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Assurance-vie et liquidation civile d’une succession : faut-il réformer ?

Par Michel Leroy, Responsable du Master, mention droit du patrimoine, Responsable du Master II, ingénierie du patrimoine. Université Toulouse I – Capitole, membre du Comité scientifique de la revue Droit & Patrimoine

Découvrez l'édito du dernier numéro de Droit&Patrimoine Magazine (n°306 - octobre 2020). 

À la fin de l’année dernière, le groupe de travail sur la réserve héréditaire exprima*, le souhait de « soumettre, pour les seuls aspects civils, l’assurance-vie au droit commun des successions et des libéralités ».

L’objet de cette proposition était de traiter le contrat comme une donation lorsqu’il constitue une libéralité (rapp. Préc., p. 155).

À cette fin, le rapport préconisa de « mentionner dans la loi, afin de guider le juge et de limiter le contentieux les critères permettant d’identifier les assurances vie constitutives de libéralités en droit civil » (proposition n° 24).

En droit positif, ce n’est que de façon exceptionnelle que la valeur d’un contrat d’assurance vie est prise en compte dans le traitement liquidatif d’une succession.

Pour l’essentiel, les hypothèses sont les suivantes (pour les contrats dénoués) : la garantie décès est prise en compte comme un actif successoral, en cas d’absence, volontaire ou non, d’une désignation bénéficiaire efficace au jour du décès de l’assuré, ou en cas de requalification du contrat en donation en raison de l’absence d’aléa au jour de conclusion du contrat, ou en cas de désignation du bénéficiaire sur le lit de mort, ou encore en cas d’intégration volontaire.

Les primes sont traitées comme l’objet d’une libéralité en cas d’exagération manifeste dans leur versement.

La valeur de rachat est également traitée comme une libéralité, en cas de renonciation à la créance de rachat, exprimée par une clause particulière, ou révélée par les circonstances de fait.

Faut-il bouleverser cet état actuel de la jurisprudence, au risque de déstabiliser un placement, déjà affecté par la crise sanitaire ?

Il serait légalement possible de limiter l’application de l’article L. 132-12, al 1er aux seules assurances de prévoyance. Mais comment distinguer clairement entre ces deux catégories d’assurance ? Si j’investis à l’âge de 50 ans un million d’euros sur un contrat couvrant le risque de survie et de décès, alors qu’il me reste statistiquement 45 ans à vivre, dans un monde dont la caractéristique principale (à l’inverse d’il y a encore 20 ans) est son instabilité, est-ce de la prévoyance ou de la pure épargne ? Et comment traiter une garantie constituée à partir de versements échelonnés de montants différents justifiés par une diversité de raisons ?

La réintégration des primes dans les opérations liquidatives est une mesure beaucoup plus pertinente et adaptée aux caractéristiques de l’assurance vie que le traitement de la garantie comme une libéralité.

Or, le droit prévoit déjà une telle intégration. Mais l’application des dispositions de l’article L. 132-13, al. 2 du Code des assurance n’est pas satisfaisante.

Si réforme il devait y avoir, c’est sans doute sur ce texte que les propositions devraient s’exprimer, tant son application pose des difficultés (V. par exemple, Pour une réécriture de l’article L. 132-13 du Code des assurances, Dr.&Pat. 2019, n° 187). Et dans ce cas, comme l’exprime une réponse ministérielle récente « L’édiction de critères d’appréciation du caractère exagéré des primes, tout comme de critères permettant d’identifier les assurances-vie constitutives de libéralités, doit s’insérer dans le cadre d’une réflexion plus large sur la réserve héréditaire ». Rép. min. n° 15361 : JO Sénat 18 juin 2020, p. 2845.

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