A PROPOS DES ARBRES D'ALIGNEMENT
L’article L. 350-3 du code de l’environnement vise à protéger les allées d’arbres qui bordent les voies de communication. S’il ne peut, en principe, être porté atteinte à ces arbres, des dérogations peuvent toutefois être accordées pour les besoins de projets de construction. Le conseil d’État vient de juger que l’autorisation d’urbanisme délivrée dans le cadre d’un tel projet vaut dérogation au sens de ce texte, de sorte qu’il appartient à l’autorité administrative compétente de s’assurer de la nécessité de l’atteinte portée aux arbres pour les besoins du projet de construction ainsi que de l’existence de mesures de compensation appropriées et suffisantes. Ce sont les mal-aimés de la famille. Parce qu’ils sont isolés ou en trop pet it nombre pour compter, les arbres hors forêts sont laissés pour compte.
L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) les définit par défaut, les regroupant dans une annexe qui comprend tous les arbres qui se trouvent en dehors des forêts et des autres terres boisées (1), autrement dit tous les spécimens qui poussent sur des terres où le couvert ligneux fait moins de 10 %. Cette catégorie rassemble les arbres champêtres, les arbres isolés ou combinés aux haies et aux bosquets ainsi que les arbres d’alignement. Ces arbres représentent pourtant, au niveau mondial, une part non négligeable de la production de bois. Ils ont joué un grand rôle dans le développement du territoire rural et urbain. Aujourd’hui encore, ils contribuent au bien-être des populations (2). Sans les ignorer complètement, le législateur ne leur accorde aucun vér i table s tatut jur id ique (3). L’article L. 111-1 du code forestier précise d’emblée qu’il ne s’applique qu’aux bois et aux forêts, l’article L. 111-4 renvoyant au code rural et de la pêche maritime et au code de l’urbanisme s’agissant des autres arbres entendus comme « les haies, boisements linéaires ou arbres isolés ».
Ce désintérêt a conduit à la diminution progressive du nombre de ces arbres, sans égard pour les services essentiels qu’ils procurent. Ils jouent en effet un rôle essentiel dans le fonctionnement écologique de l’environnement urbain, en raison de leur capacité à stocker le carbone, à prendre une part active dans le cycle de l’eau, à réguler les ef fets de la chaleur en été et, de manière générale, à constituer des écosystèmes complexes. La situation des arbres d’al ignement, ces spécimens plantés de manière linéaire et régulière le long des routes, des rues et des al lées pour les orner et les ombrager (4), mérite que l’on s’y arrête car el le montre à la fois la valeur des arbres hors forêt et les difficultés rencontrées pour leur forger un statut juridique. Elle témoigne, en effet, d’une prise de conscience récente du législateur pour ce qui constitue un véritable patrimoine (I) mais aussi des difficultés rencontrées pour élaborer, sous le contrôle du juge, un statut juridique simple et efficace (II).