L’AUTORISATION JUDICIAIRE À PROCÉDER À UNE DONATION DANS LE CADRE D’UNE HABILITATION FAMILIALE
Le 15 décembre 2021, la première chambre civile de la Cour de cassation, saisie pour avis, a précisé les conditions dans lesquelles le juge des contentieux de la protection peut autoriser la personne habilitée à procéder à une donation malgré l’impossibilité de caractériser l’intention libérale de la personne protégée. Saisie d’une demande d’avis formulée par le tribunal judiciaire de Rouen, la première chambre civile de la Cour de cassation devait se prononcer sur la question suivante : « L’absence de caractérisation d’une intention libérale, présente ou passée, de la personne protégée, fait-elle nécessairement obstacle à la possibilité, pour le juge des contentieux de la protection, d’autoriser la personne habilitée à la représenter de manière générale pour l’ensemble des actes relatifs à ses biens, sur le fondement des articles 494-1 et suivants du code civil, à procéder à une donation ? »
La Cour de cassation ne ferme pas la possibilité d’autoriser la personne habilitée à procéder à une ndonation, sur le fondement de l’article 494-6, alinéa 4, du code civil, à défaut de pouvoir caractériser une intention libérale de la personne protégée. Elle retient que lorsque la personne protégée est hors d’état de manifester sa volonté, le juge des contentieux de la protection peut autoriser la personne habilitée à procéder à une donation en son nom si deux conditions sont réunies. L’acte doit correspondre, dans son objet comme dans sa destination, à ce qu’aurait voulu la personne protégée si elle avait pu consentir. L’acte doit également être conforme à sesintérêts personnels et patrimoniaux, c’est-à-dire préserver, en particulier, les moyens permettant à la personne protégée de maintenir son niveau de vie et de faire face aux conséquences de sa vulnérabilité. L’av i s susci te deu x sér ies de remarques selon qu’il est analysé au prisme du droit des majeurs protégés ou du droit des libéralités.
D’un côté, les conditions subordonnant l’autorisation judiciaire sont le résultat d’un compromis pragmatique, quoiqu’assez original, entre le respect de la volonté et la préservation des intérêts de la personne protégée (I). De l’autre, parce que l’intention libérale est écartée, l’avis déroge au droit des libéralités entre vifs et révèle, in fine, la fonction de lex specialis du droit des majeurs protégés (II).