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Bien maîtriser les outils juridiques et fiscaux pour transmettre son entreprise… mais encore ?

Par Martine Blanck-Dap, avocate associée, LPA-CGR avocats

"La transmission n’est jamais un processus rationnel et linéaire car c’est avant tout un processus très chargé émotionnellement, à la fois pour les dirigeants et ses héritiers."

1• « Compte tenu de l’âge de leurs dirigeants la moitié des ETI familiales devront changer de mains dans les années qui viennent » (Alexandre Montay, Délégué Général du METI Mouvement des entreprises de tailles intermédiaires).

Les entreprises familiales sont souvent vitales pour l’économie au moins à l’échelle locale où elles font vivre un bassin d’emploi important. Le passage générationnel demeure cependant critique notamment à la troisième génération qui sonne souvent le glas de l’entreprise familiale contrainte au mieux de laisser la place à un management extérieur voire à céder son capital.

2• Le législateur n’a pourtant pas ménagé sa peine ces dernières années pour aider à la transmission d’entreprise même si la loi Pacte est à cet égard décevante. Celle-ci a introduit un ensemble de mesures techniques (notamment la suppression d’un certain nombre de seuils sclérosants) destinées à dynamiser la vie de l’entreprise mais n’a rien apporté de révolutionnaire en matière de transmission d’entreprise.

Le principal apport de la loi réside dans l’assouplissement du régime Dutreil avec la réduction des seuils de détention et la levée des obligations déclaratives, qui si elles étaient omises auparavant, pouvaient conduire à une remise en cause du régime de faveur dont les conséquences pouvaient s’avérer dramatiques pour les détenteurs de titres. Sans doute, le législateur devrait-il encore travailler ce sujet afin de voir porter l’abattement à 90 % sur les parts transmises en contrepartie d’une obligation de détention augmentée.

3• Les outils juridiques et fiscaux pour faciliter la transmission d’entreprise sont aujourd’hui assez bien connus des professionnels et des chefs d’entreprise.

Outre le dispositif Dutreil qui permet de procéder à un abattement de 75 % de la valeur des parts (et donc de n’être taxé qu’à hauteur de 25 %) dès lors qu’au moins deux associés (détenant 34 % du capital ou 20 % si l’entreprise est cotée en bourse) prennent l’engagement de conserver les parts deux ans avant la transmission suivi d’un engagement individuel de conservation de quatre ans, les entrepreneurs savent désormais privilégier la donation-partage (qui fige les valeurs transmises) pour transmettre leurs parts sans réouvrir le débat de la valeur postérieurement au décès du donateur.

Ils entendent aussi recourir à la donation de titres avec réserve d’usufruit, ce qui permet aux chefs d’entreprise de continuer à percevoir des dividendes sachant toutefois que lorsque la transmission bénéficie des avantages Dutreil, le donateur usufruitier ne peut conserver les droits de vote que pour l’affectation des bénéfices à l’exclusion de toute autre résolution.

Les chefs d’entreprise ont recours aussi fréquemment au mécanisme du LBO (Rachat avec effet de levier) qui permet de vendre l’entreprise à l’un des enfants qui s’endettera au travers d’une holding dans laquelle il fera remonter les dividendes de la société ; l’opération permettant aux parents de percevoir un capital aujourd’hui exonéré d’ISF. Ce schéma qui est pareillement utilisé lorsque l’un des enfants hérite de l’entreprise par donation ou succession à charge pour lui de verser une soulte à ses frères et sœurs, est d’autant plus attrayant en période de forte liquidité et de taux bancaires bas.

Enfin, rappelons que lorsqu’un parent fait donation en pleine propriété des parts qu’il détient au sein de l’entreprise avant ses 70 ans, les droits de donation sont réduits de 50 % ; les parties pouvant également demander à l’administration fiscale de différer le paiement des droits de succession ou de donation pendant 5 ans, l’impôt pourra faire l’objet ensuite d’un paiement fractionné pendant 10 ans (avec intérêts calculés au taux légal et moyennant garantie).

4• Pour autant, malgré cet arsenal de mesures, la transmission d’une entreprise peut s’avérer être un échec faute pour les bénéficiaires familiaux d’avoir su construire ensemble un projet d’entreprise et de poursuivre une vision commune.

Comme l’a indiqué Rania Labaki, Directrice de l’Edhec Family Business Center « la transmission n’est jamais un processus rationnel et linéaire car c’est avant tout un processus très chargé émotionnellement, à la fois pour les dirigeants et ses héritiers ».

En ce sens, la transmission doit commercer très tôt bien avant la mise en place du processus juridique de transmission pour que les enfants se familiarisent avec la société et ne découvrent pas celle-ci lors de la signature du pacte Dutreil. Le choix du successeur constitue souvent aussi un écueil : comment identifier parmi les enfants celui qui sera le bon manager ? celui qui s’identifie affectivement aux objectifs de l’entreprise ou celui qui souhaite accéder à la direction pour imprimer sa marque personnelle ?

Une fois le bon successeur trouvé, il faut s’attacher à organiser l’implication des autres, ceux qui ne font pas partie de la gouvernance de l’entreprise mais représentent le groupe des actionnaires familiaux répartis parfois sur trois générations et dont l’absence de cohésion peut mettre en péril la tenue des assemblée générales et plus généralement la stratégie de l’entreprise en empêchant par exemple celle-ci de conduire efficacement sa politique de développement et d’investissements.

5• La rédaction d’un pacte d’actionnaires est évidemment essentielle pour organiser notamment la cession des titres (droit de préemption, droit de préférence au profit des membres de la famille, méthode de valorisation des parts), anticiper les questions de trésorerie avec l’aménagement de clauses de petites ou grandes liquidités pour les membres qui voudraient sortir de la société, intégrer éventuellement la désignation d’un tiers administrateur représentant les actionnaires qui seraient encore mineurs ou jeunes adultes, mais cela ne suffit pas toujours pour asseoir la cohésion du groupe.

Dans les entreprises dans lesquelles le capital de l’entreprise est détenu par un grand nombre de personnes, l’adhésion à une charte de famille qui rappelle l’histoire et les valeurs de l’entreprise, les droits et les devoirs des actionnaires est tout aussi importante ; encore faut il qu’un membre de la famille se charge d’animer le groupe et qu’annuellement la cohésion de celui-ci soit éprouvée ainsi que son soutien aux actionnaires managers.

Les actions philanthropiques de l’entreprise peuvent constituer à cet égard un formidable vecteur de cohésion familiale. Elles permettent par exemple au travers de la constitution d’un fonds de dotation, à un enfant qui n’a pas vocation immédiatement à diriger l’entreprise ou qui poursuit d’autres activités, de s’impliquer néanmoins aux cotés de celle-ci et de porter autrement les valeurs familiales.

Il y a là un terreau commun entre l’entreprise qui à l’égard de ses populations internes, ses salariés notamment, doit être capable d’expliciter la quête de sens qu’elle poursuit et l’action philanthropique qu’elle peut mener en marge de l’entreprise mais avec celle-ci.

Au-delà du cadre fiscal avantageux du mécénat d’entreprise qui permet de déduire les dépenses de mécénat de l’impôt sur les sociétés à hauteur de 60 % des dépenses engagées et dans la limite de 5 ‰ du chiffre d’affaire de la société, celui-ci permet aussi d’impacter la stratégie de l’entreprise et d’attirer de nouveaux talents intéressés par la culture, l’histoire de celle-ci et ses valeurs.

En ce sens, les actionnaires familiaux managers et ceux qui ne feraient pas partie de la gouvernance ont le même rôle à jouer dans l’intérêt de l’entreprise familiale. D’un côté, « la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité » ainsi que l’envisage l’article 169 de la Loi Pacte, ce qui caractérise bien l’entreprise familiale, de l’autre, elle porte les mêmes valeurs historiques et familiales dans le cadre de ses activités de mécénat.

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