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Baux commerciaux - Précisions sur l’office du juge des loyers commerciaux

Par LA LETTRE DES JURISTES D'AFFAIRES

En 2003, des parties s’accordent pour le renouvellement d’un bail pour une durée de 12 ans, moyennant un loyer annuel minimum garanti fixé à une certaine somme et pour reconduire une clause selon laquelle le loyer annuel ne pourra être inférieur à 1,50 % du CA hors taxes réalisé par le preneur dans les locaux entre les 1er janvier et 31 décembre de chaque année. En 2015, une locataire sollicite le renouvellement du bail dont le principe est accepté par la bailleresse. Celle-ci demande la fixation du loyer du bail renouvelé à un certain montant, au motif que le bail expiré ayant été signé pour douze ans, le loyer n’était pas plafonné et devait être fixé à la valeur locative, puis assigne la locataire devant le juge des loyers commerciaux en fixation du prix du loyer renouvelé. Par un mémoire rectificatif, la locataire soulève l’incompétence du juge des loyers commerciaux et l’irrecevabilité de la demande de la bailleresse, arguant que le loyer binaire était régi uniquement par la volonté des parties.

Soulevant un moyen d’office, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa des articles 1134, alinéa 1er, du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, L. 145-33 à L. 145-36 et R. 145-23 du code de commerce, 71 et 122 du code de procédure civile. Elle précise d’abord que « 17. (…)  [le] moyen soulevé par l’une des parties à un bail commercial pour s’opposer à une demande en fixation du prix du bail renouvelé à la valeur locative, au motif que les parties sont convenues d’un loyer comprenant une part variable sans prévoir de recours au juge des loyers commerciaux pour fixer la part fixe ou le minimum garanti à la valeur locative  (…) 18. (…) s’analyse en une défense au fond et non en une fin de non-recevoir ». Elle précise ensuite « 20. (…) l’office du juge des loyers commerciaux saisi d’une contestation portant sur le prix du bail renouvelé d’un loyer compre­nant une part variable ». Après avoir retracé l’évolution jurisprudentielle, « 22. La Cour de cassation [ayant], dans un premier temps, jugé que lorsque les parties avaient stipulé un loyer comprenant une part variable, la fixation du prix du loyer renouvelé n’était régie que par leur convention et ne pouvait résulter que de leur accord (…). 23. Puis (…) que lorsque les parties sont convenues d’un loyer comprenant un minimum garanti et une part variable, elles peuvent prévoir, par une clause du contrat, de recourir au juge des loyers commerciaux pour évaluer, lors du renouvellement, ce minimum garanti à la valeur locative (3e civ., 3 novembre 2016, pourvoi n° 15-16.826, Bull. 2016, III, n° 145 ; 3e civ., 29 novembre 2018, pourvoi n° 17-27.798, publié) », elle juge que « 25. Si les parties qui stipulent une clause de loyer variable manifestent ainsi, en principe, une volonté d’exclure une fixation judiciaire du prix du bail renouvelé à la valeur locative, il en va autrement lorsqu’elles ont exprimé une volonté commune contraire. 26. Dès lors, même en l’absence d’une clause expresse de recours au juge des loyers commerciaux, il appartient à celui-ci, lorsqu’il est saisi du moyen de défense au fond énoncé aux paragraphes 17 et 18, de rechercher cette volonté commune contraire, soit dans le contrat, soit dans des éléments extrinsèques. 27. Ainsi, le fait que toute contestation sur le prix d’un bail renouvelé ne se résolve pas par une fixation judiciaire à la valeur locative et puisse aboutir au maintien du loyer antérieur, les parties pouvant toujours exercer leur droit d’option, ne méconnaît pas le droit d’accès au juge consacré par l’article 6 § 1 de la [CESDH] ».

OBSERVATIONS.

Les parties qui stipulent une clause de loyer variable, manifestant ainsi leur volonté d’exclure une fixation judiciaire du prix du bail renouvelé à la valeur locative, peuvent aussi exprimer une volonté commune contraire. Le juge des loyers commerciaux, saisi du moyen de défense au fond selon lequel les parties sont convenues d’un loyer comprenant une part variable sans prévoir de recours au juge des loyers commerciaux pour fixer la part fixe ou le minimum garanti à la valeur locative, doit donc rechercher cette volonté commune contraire, soit dans le contrat, soit dans des éléments extrinsèques. I.T.

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