Trois questions à Stéphane Baller, avocat associé EY Société d’Avocats et co-directeur du DU T2DL Transformation digitale du droit & Legaltech de Paris II
Paru dans Droit & Patrimoine Hebdo n°1193 du 03 juin 2019
Le 23 mai dernier, EY Société d’Avocats organisait la 5e édition des rendez-vous de l’innovation pédagogique en droit, qui rassemblait professeurs, praticiens et étudiants. Le point.
Doit-on considérer les nouvelles technologies sont les grandes absentes des études de droit ?
Si l’on parle des universités, c’est en effet peut-être le cas, car dans les amphis, les jeunes qui se dirigent vers les professions du droit rêvent de la robe et du côté noble du métier. Il faut dire que les enseignants ne donnent pas toujours l’exemple de l’utilisation des nouveaux outils, et qu’en dehors de Doctrine et Predictice, on connaît très peu les legaltechs. La formation pour structurer les nombreux étudiants en droit, centrée sur le raisonnement juridique qui est une figure imposée, prend rarement en compte ces nouveaux outils. Mais les étudiants qui font preuve de curiosité ont tout à portée de main à l’université. Ils peuvent choisir de compléter leur parcours, pas seulement avec le digital, en prenant par exemple des cours de codage, mais aussi avec l’économie, les sciences humaines et bien d’autres choses. La liberté de choix existe et elle est immense, mais il faut que les professionnels du droit donnent l’exemple en suscitant la curiosité et en accompagnant l’Université comme nous le faisons.
Les professionnels ne donnent pas assez l’impulsion, selon vous ?
Qualifier les legaltechs de « braconniers du droit » n’était pas la meilleure idée ! Aujourd’hui encore lorsque l’on parle d’entreprises du droit ou marché du droit, cela suscite des grincements de dents chez certains professionnels. Les Ordres ont un rôle important à jouer en la matière. En se transformant, en se digitalisant, ils peuvent accompagner nos confrères pour changer leurs habitudes. Ils ont un rôle pédagogique à ne pas négliger, tout comme le CNB qui met en place des outils partagés, dont on n’apprend d’ailleurs pas forcément à se servir dans les écoles d’avocats, ce qui est un peu dommage.
Vous organisez la 2e édition de Technodroits 92 le 24 juin prochain,
à Assas, pouvez-vous nous en parler ?
Cette deuxième édition mettra à l’honneur les femmes, car les 13 membres du jury qui remettront des prix aux 12 projets que nous sélectionnerons sont des avocates, directrices d’école d’avocats, ingénieures, legal designers. Elles sont d’ailleurs nombreuses à innover et à oser se lancer dans des projets digitaux. La communauté legaltech viendra ainsi investir l’université Paris 2 et 4 prix seront remis : le prix du public, le prix du barreau des Hauts-de-Seine, qui récompensera des élèves-avocats, le prix de l’AFJE, qui est une nouveauté et récompensera de jeunes juristes, et le grand prix du jury. Parmi les candidatures, il y a déjà 6 projets d’étudiants du DU Transformation digitales du droit, dont une très belle idée pour accompagner les jeunes en situation de handicap dans leurs études de droit. Nous devrions recevoir les dossiers d’élèves avocats de l’IXAD de Lille, de l’ERAGE Strasbourg, de l’HEDAC et du Lab EFB de Paris.
Propos recueillis par Anne Portmann