3 questions au président de la Compagnie nationale des experts-comptables de justice
D&P : Combien y a-t-il d’experts-comptables de justice aujourd’hui et sur quels types de dossiers sont-ils le plus sollicités ?
M. T. : Nous sommes 500 en France pour 20 000 experts-comptables – dont 24 dans le ressort des cours d’appel de Toulouse et d’Agen, sachant qu’il n’y a pas d’exclusivité territoriale. Nous traitons une dizaine de missions par an qui sont en général assez lourdes : elles vont du chiffrage d’un patrimoine dans le cadre d’un divorce à des affaires beaucoup plus compliquées qui nécessitent 2 000 heures de travail. L’éventail est très large.
D&P : Quel est votre programme ?
M. T. : Mon ambition est de développer la formation, ensuite d’accroître la publication de ces bonnes pratiques. J’attache en effet de l’importance à la formation en interne mais aussi en externe. J’ai par exemple créé il y a trois ans à Toulouse une formation à destination des magistrats dont la vocation est de les familiariser aux techniques financières. Je souhaite dans le cadre de mon mandat développer cette initiative dans toutes les cours d’appel. À Toulouse également, j’ai créé, avec le soutien de l’université Toulouse 1 Capitole, le diplôme universitaire national d’expertise comptable de justice dont les cours viennent de démarrer. L’objectif, là, est d’améliorer la qualité des experts-comptables de justice. J’encouragerai également les universités des grandes cours d’appel comme Lyon, Douai, Aix-Marseille et Rennes à créer ce type de diplôme. On peut en effet le dupliquer et ce sera déjà le cas l’année prochaine à Montpellier, dans le cadre de la nouvelle région Occitanie. Enfin, je souhaite mettre la compagnie au cœur de la réflexion des métiers du chiffre. Car, aussi bien la Compagnie des commissaires aux comptes que l’Ordre des experts-comptables ont un peu tendance à réfléchir seuls dans leur coin alors que nous pourrions associer d’autres organisations à ces réflexions, ne serait-ce que pour donner aux « comptables », pour faire court, une visibilité beaucoup plus importante qu’elle ne l’est aujourd’hui.
D&P : Comment cette visibilité pourrait-elle prendre forme ?
M. T. : Je milite pour la création d’une fédération qui regrouperait le Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, la Compagnie des commissaires aux comptes, la Compagnie des experts-comptables de justice, la Compagnie des experts financiers, la Société française des évaluateurs, qui ainsi deviendrait un corps puissant, capable de peser et d’être mieux reconnu à l’international. Les experts-comptables de justice n’existent en effet pas qu’en France. Nous avons beaucoup de contact avec nos homologues étrangers justement pour améliorer les méthodes. L’idée est d’aller vers la publication de normes internationales, en matière d’évaluation notamment, à destination des experts.
Propos recueillis par Clémentine Delzanno
Interview publiée dans Droit & patrimoine l'hebdo 2016, n° 1075 (31 oct. 2016)