Résiliation aux torts réciproques : peu importent les fautes si la volonté est de ne pas continuer.
Paru dans Droit&Patrimoine Hebdo - n°1161 - du 01 octobre 2018
Jurisprudence - Immobilier - Résiliation aux torts réciproques : peu importent les fautes si la volonté est de ne pas continuer.
Un couple confie la construction de sa maison individuelle à une société, mais les relations entre les deux parties finissent par se détériorer, les premiers reprochant notamment au second des malfaçons. Le constructeur assigne alors les époux en paiement du solde de son marché, ces derniers demandant reconventionnellement que le constructeur soit déclaré entièrement responsable de l’arrêt du chantier et tenu de les indemniser. La cour d’appel prononce la résiliation du contrat aux torts réciproques des parties. Face à cette situation, les époux forment un pourvoi dans lequel ils soutiennent qu’il y aurait là une violation de l’ancien article 1184 du code civil, car elle aurait dû rechercher la part de responsabilité incombant à chacune des parties eu égard aux prétendus torts retenus, ainsi que la part du dommage de l’une et de l’autre qu’elles doivent respectivement supporter de ce fait. Mais la Cour de cassation rejette les critiques du pourvoi et approuve le raisonnement de la cour d’appel « ayant relevé que les parties n’avaient ni l’une, ni l’autre, voulu sérieusement poursuivre l’exécution du contrat après le dépôt du rapport d’expertise » et « sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, [elle] a pu prononcer la résiliation du marché de travaux aux torts réciproques des parties ».
OBSERVATIONS. La Cour de cassation apporte une précision intéressante en matière de résiliation aux torts réciproques des parties. En effet, deux leçons peuvent être dégagées : d’une part, la résiliation aux torts partagés peut résulter de la volonté concordante des parties de ne pas poursuivre le contrat ; et, d’autre part, les torts réciproques ne supposent pas une appréciation des fautes respectives des parties (rappr. Cass. 1re civ., 9 juin 1993, n° 91-18.241 ; comp. Cass. com., 5 déc. 2000, n° 98-12.827 ; Cass. com., 17 mars 1998, n° 95-17.466). Cette solution rendue au regard de l’ancien article 1184 du code civil, s’appliquera aussi en référence à l’article 1228 nouveau du code civil.
Réf. : Cass. 3e civ., 6 sept. 2018, n° 17-22.026, P+B+I
NOMENCLATURE DES ARRÊTS DE LA COUR DE CASSATION : F : formation à 3 ; FS : formation de section ; FP : formation plénière de chambre ; D : arrêt diffusé ; P : arrêt publié au bulletin mensuel ; P + B : arrêt publié au bulletin d’information ; R : arrêt mentionné dans le rapport annuel ; I : arrêt publié sur le site internet ;