Déclaration de créance - La demande de relevé de forclusion d’un créancier doit être accueillie dès lors qu’il ne figurait pas sur la liste des créanciers
Un jugement de 2019 condamne une société à payer une somme de 65 000 € à un créancier et ordonne la compensation de cette somme avec celles versées auparavant à titre de dépôts de garantie. Contestant être débitrice, la société fait appel du jugement. Elle fait l’objet, quelques mois plus tard, d’une procédure de redressement judiciaire. En 2021, le créancier, qui n’avait pas déclaré sa créance dans les deux mois de la publication d’ouverture de la procédure collective, demande au juge-commissaire du tribunal de commerce d’être relevé de forclusion.
La cour d’appel ayant fait droit à cette demande, la société débitrice forme un pourvoi : elle soutient que le débiteur ne commet pas une omission lors de l’établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l’article L. 622-6 du code de commerce, lorsqu’il ne mentionne pas, dans cette liste, le nom d’une personne, dont il conteste être le débiteur d’une quelconque créance, peu important qu’un jugement ait retenu que cette personne détient une créance à l’égard du débiteur, dès lors que celui-ci a interjeté appel de ce jugement.
Mais la chambre commerciale rend un arrêt de rejet. Elle juge, « 5. En premier lieu, [qu’]il résulte de l’article L. 622-24 du code de commerce que la créance portée par le débiteur, conformément à l’obligation que lui fait l’article L. 622-6 du même code, à la connaissance du mandataire judiciaire dans le délai de l’article R. 622-24 du même code, si elle fait présumer la déclaration de sa créance par son titulaire, dans la limite du contenu de l’information donnée au mandataire judiciaire, ne vaut pas reconnaissance par le débiteur du bien-fondé de cette créance, de sorte qu’il peut ultérieurement la contester [et] 6. En second lieu, [que] selon l’article L. 622-26 du code de commerce, l’omission du créancier par le débiteur sur la liste prévue à l’article L. 622-6 précité permet à ce créancier d’être de plein droit relevé de la forclusion par le juge-commissaire ». Or, en l’espèce, « 7. Ayant relevé que la société [créancière] ne figurait pas sur la liste des créanciers, l’arrêt retient exactement que la demande de relevé de forclusion de celle-ci doit être accueillie, [le débiteur] ne pouvant valablement soutenir qu’il n’avait pas à la mentionner sur la liste de ses créanciers au motif qu’il ne peut lui être imposé de déclarer pour le compte d’un créancier une créance dont il conteste l’existence ».
Observations. Le débiteur doit faire figurer sur la liste tous ses créanciers, même s’il conteste l’existence d’une créance. La Cour a ainsi déjà jugé qu’il n’appartient pas au juge-commissaire de vérifier l’existence de la créance si elle est contestée par le débiteur, avant de statuer sur la demande de relevé de forclusion fondée sur une omission volontaire du débiteur lors de l’établissement de la liste de ses créanciers (com., 12 janv. 2010, n° 09-12.133). P.P.
Réf. : Cass. com., 3 juil. 2024, n° 23-15715, F-B.